Les animaux rampants n’ont pas bonne presse depuis que Dieu a maudit le serpent qui avait fait chuté nos premiers parents en Eden. Il est cependant une autre race de rampants, inoffensifs et même très bénéfiques : les vers de terre. Nous les piétinons chaque jour au jardin sans risquer de leur écraser la tête. Les biologistes les appellent « espèce ingénieur » tant leur présence active modifie l’environnement. En effet, ils sont essentiels pour la gestion des nutriments, la structuration des sols, le cycle de l’eau. Ces vers aux multiples bienfaits sont ainsi devenus des amis et en retournant le tas de compost, leur prolifération me renseigne sur l’équilibre de nos déchets organiques (bonne proportion azote-carbone notamment) et présage un produit final idéal. Le compost obtenu stimulera à merveille la croissance des fleurs pour orner le cloître et la chapelle. Quelle magnifique grammaire de ce livre de la nature, comme dirait Benoît XVI (Caritas in Veritate, n° 48 et 51) ! Et si notre contemplation a pris son point de départ dans l’admiration des artisans souterrains que sont les vers de terre, elle se prolonge devant la multitude de fleurs aux formes, couleurs et parfums si variés, qui se seront épanouies à partir de graines minuscules enfouies dans ce bon terreau.
N’est-ce pas une parabole de notre vie spirituelle ? Notre vie est comme ce terreau, ces graines et ces vers. Avec l’aide de la grâce de Dieu, notre quotidien tout ordinaire et caché, enfoui dans la Parole de Dieu que nous méditons continuellement, produira des œuvres bonnes portant des fruits de bénédiction et de salut. Telle un parterre multicolore, la communauté devient peu à peu un bouquet harmonieux, et les dons du Saint Esprit que nous nous apprêtons à recevoir à la Pentecôte viendront couronner cette belle œuvre. Saint Cyrille de Jérusalem dans une lecture de ces jours préparatoires à la Pentecôte l’exprime ainsi : comme la pluie, l’Esprit Saint tombe sous une seule forme et opère de façon multiforme : il s’adapte à ceux qui le reçoivent et produit en chacun ce qui lui convient. Préparons-nous à découvrir la biodiversité spirituelle que le Seigneur insufflera dans nos vies, embellissons des dons reçus nos proches, notre Église, notre société en quête de paix et d’harmonie.
